Cet article sur le paradigme de programmation fonctionnel est le 3ème de notre série sur les paradigmes de programmation. N'hésitez pas à prendre connaissance des deux premiers articles :
Lambda-calcul, un système du paradigme de programmation fonctionnel
Créée par Alonzo Church en 1930, cette théorie mathématique
définit les fondations des fonctions et des applications. C’est le premier
formalisme qui permet de gérer les fonctions récursives. Le lambda-calcul, la
machine de Turing et le modèle Herbrand-Gödel sont des éléments essentiels de
la théorie de la calculabilité.
L’un des principes du lambda-calcul est que « tout est fonction ». Comme le changement d'état et la mutation des données ne peuvent pas être représentés par des évaluations de fonctions la programmation fonctionnelle ne les admet pas, au contraire elle met en avant l'application des fonctions, contrairement au modèle de programmation impérative qui met en avant les changements d'état.
Lisp
En 1958, John Mac Carthy et son équipe implémente le premier interpréteur LISP (LISt Processing ou, pour les médisants, Lots of Idiot and Stupid Parenthesis) en se basant sur la
théorie du lambda-calcul. Dédié à résoudre des problèmes qui ne pouvait pas
être résolu par FORTRAN (notamment grâce à la récursivité), le Lisp est à
l’origine de beaucoup de progrès en informatique théorique. La programmation
orientée objet dérive des langages fonctionnels : Smalltalk le premier
langage objet qui a été popularisé était écrit en Lisp…
Le Lisp est un langage dit préfixé : la fonctionnelle
est toujours en première position ce qui facilite le parsing. Le noyau de base
est composé de très peu d’instructions (defun, car, cdr, cond, cons et les
opérateurs de base). C’est, donc, un langage relativement simple mais très
expressif :
( + 5 3)
-> 8(/ 8 2)
-> 4(defun f(x) (* x x))
-> définit une fonction f qui prend un argument x et qui retourne x*x
De nombreuses variantes de Lisp ont été développé au cours
du temps. La plus répandue aujourd’hui est GNU Common Lisp. Lisp est aussi le
langage de macros dans emacs (un éditeur de texte sous unix qui est très populaire),
ou sous sa version AutoLisp le langage de macros dans AutoCAD.
Pour en apprendre plus, je vous conseille de jeter à œil à : https://fr.wikipedia.org/wiki/Lisp.
Concepts sous-jacent du paradigme fonctionnel
La pureté
Les fonctions sont dites 'pure' lorsqu'elles ont des résultats qui ne dépendent strictement que de leurs arguments, sans autre effet externe. Voici un exemple de fonction pure :
Voici un exemple de fonction impure :
Une fonction pure permet de cloisonner, de localiser le code
mis en œuvre. Cela augmente sa stabilité, son déterminisme et facilite sa
compositionnalité.
Fonction de première classe
Être de première classe, c’est donc avoir le même statut qu’une valeur telle qu’un entier ou un caractère, c’est-à-dire :
Pouvoir être nommé, affecté (et typé) :
x=sin
Pouvoir être défini et créé à la demande :
x= lambda x: x+1
Pouvoir être passé en argument à une fonction :
map(lambda x: x*x, [1, 3, 4 ] )
Pouvoir être le résultat d’une fonction :
(f( 3 ) ) ( 5 )
Pouvoir être stocké dans une structure de données quelconque :
array=[ log, exp, tan ]
Notion de fermeture
Mais, pour être pure et/ou de première classe, une fonction doit parfois être transformée en fermeture (closure), i.e. l’association du code de la fonction avec un environnement de définitions.
La fonction f retourne une fonction h qui prend un argument mais dépend des 2 arguments passés à f.
Exemple de paradigme fonctionnel
Voici un exemple de fonction qui parcourt récursivement une arborescence de fichiers et, qui pour chaque fichier qui respecterait un ‘prédicat’ appliquerait une fonction.
Sans programmation fonctionnelle, ce type d’implémentations serait impossible.
Conclusion
La programmation fonctionnelle est bonne pour le
développement de programmes : pureté et première classe induisent une part de stabilité,
déterminisme, testabilité, cloisonnement, fluidité d’utilisation,
compositionalité, généralisation, extensibilité, etc.
La programmation fonctionnelle est bonne pour
l’objet-modulaire : elle met un peu d’huile dans les rouages, et amoindrit parfois
la complexité des architectures.
La programmation fonctionnelle est soluble :
pureté et première classe des fonctions peuvent être considérées, incluses et
facilitées dans n’importe quel langage.
La plupart des langages supportent le paradigme fonctionnel : Python, C++, Java, C#, etc…